Le 28 juin 2023, la Cramif organisait une journée dédiée à la prévention des risques professionnels dans le secteur sanitaire : de nombreux professionnels du secteur hospitalier et des cliniques franciliennes étaient réunis pour échanger ensemble sur les techniques de prévention en milieux de soins.
Anne Tournier Beney – ingénieur d’études sanitaires – département Santé Environnement de l’ARS
Donc du coup, j’interviens au niveau des départements Santé Environnement. On m’a demandé de faire aussi un petit focus sur les départements Santé Environnement de l’Agence régionale de santé avant d’aborder plus spécifiquement les thèmes amiante et légionelles qui sont, d’ailleurs, basés sur les retours d’expérience inspection-contrôle.
Donc, très rapidement parce que ça, vous connaissez très bien. L’ARS met en place et définit les politiques de santé qui sont définies par le ministère de la Santé et de la Prévention. Et du coup, pour ce qui est des départements Santé Environnement, nous, on intervient sur la gestion des risques sanitaires liés à l’environnement. Donc, je vous ai mis ici, dans cette deuxième diapositive, la définition de la santé environnementale par l’OMS. Alors, très rapidement, notamment, « ce sont tous les aspects de la santé humaine, y compris la qualité de vie, qui sont déterminés par les facteurs physiques, chimiques, biologiques, sociaux, psychosociaux et esthétiques de notre environnement ». Donc, il est admis pour la santé environnementale, la notion d’environnement renvoie au milieu de vie, que ça soit le milieu domestique, le milieu naturel ou bien ici, le milieu professionnel. Et donc ça écarte, bien sûr, toutes les expositions volontaires.
Donc, les départements Santé Environnement interviennent sur trois grands domaines d’intervention : eaux, environnement intérieur, environnement extérieur. Donc, les principales thématiques vont être listées dans les diapositives suivantes. Ce sont des missions qui sont faites pour le compte du Préfet dans le cadre du protocole ARS-Préfet — ce sont des activités régies par le Code de la santé publique — et donc, Préfet-département dans le cadre de ses compétences, dans les domaines sanitaires et de la salubrité publique.
Donc, au niveau de l’eau. Au niveau de l’eau, rapidement, l’ARS intervient de la protection de la ressource en eau potable jusqu’à la qualité de l’eau (qualité de l’eau du robinet et puis également eaux conditionnées) ; la qualité de toutes les eaux de loisirs (piscines, baignades) ; prévention de la légionellose et également usage domestique d’eau non potable.
Au niveau de l’environnement intérieur, c’est toutes les politiques d’habitat insalubre : lutte contre l’habitat insalubre, le saturnisme, prévention des intoxications au monoxyde de carbone, prévention du risque amiante, qualité de l’air intérieur, prévention de risques auditifs.
Pour ce qui est de l’environnement extérieur, on donne également des avis sanitaires sur tous les nouveaux projets d’aménagement aussi, qualité de l’air extérieur, urbanisme favorable à la santé, la lutte antivectorielle avec notamment la problématique du moustique tigre, et puis les DASRI (déchets d’activités de soins à risques infectieux).
Maintenant, au niveau des inspections-contrôles que peut faire le département Santé Environnement au sein de vos établissements, c’est surtout quatre grandes thématiques : la prévention de la légionellose, la lutte contre le risque amiante, la gestion des DASRI, et au cas où vos établissements disposent de baignades, de bassins, disons, donc les inspections des piscines.
Maintenant, on rentre dans le vif du sujet pour ce qui est des points de vigilance concernant l’amiante. Le danger au niveau de l’amiante, ce sont bien sûr les fibres d’amiante. Je vous ai mis juste une petite photo d’une roche brute d’amiante sur les diapositives. Depuis 1977, toutes les variétés d’amiante ont été classées comme cancérigènes pour l’homme, et l’usage d’amiante a été totalement interdit en 1997. Donc au niveau du Code de la santé publique, les matériaux amiantés sont classés en deux grandes catégories : matériaux de la liste A qui, possiblement, libèrent des fibres d’amiante du simple fait de leur vieillissement ; et les matériaux de la liste B qui peuvent libérer des fibres d’amiante du fait de leur sollicitation (ponçage, perçage, découpage, etc.) Donc l’exposition, c’est bien sûr l’inhalation des poussières, de ces fibres poussières d’amiante avec risque sanitaire (pathologie à la fois cancéreuse, non cancéreuse). En tant que propriétaire ou gestionnaire de ces établissements, vous êtes responsable justement de ce risque et le but, c’est justement d’éviter l’exposition de vos salariés.
Alors, comment faire pour cela ? Déjà, est-ce que votre établissement ou vos différents bâtiments sont concernés par le risque amiante ? En effet, seuls les établissements et les bâtiments dont le permis de construire est antérieur au 1er juillet 1997, sont concernés par la réglementation amiante. Alors, attention aussi aux bâtiments anciens dont on n’est pas sûr de la date de permis de construire et attention aussi aux bâtiments qui ont été rénovés puisque si vous n’avez pas la preuve, la traçabilité éventuellement, de retrait d’amiante dans des anciens bâtiments et qui sont rénovés, le bâtiment est toujours concerné par la problématique amiante. Ce qui veut dire qu’il faut absolument avoir la connaissance de la localisation de l’amiante au sein de ces bâtiments et donc, il faut effectuer des repérages de cette amiante. Et les repérages, il faut qu’ils soient complets pour avoir une connaissance globale.
Alors, quand je dis : « complets », ça veut dire quoi ? Ça veut dire complets au niveau des matériaux amiantés à la fois le repérage de tous les matériaux de la liste A et repérage de tous les matériaux de la liste B, sachant que notamment en 2011, il y a eu un petit changement réglementaire et donc, une extension de la liste des matériaux de la liste B à repérer. Et donc, attention aux dates de repérage des matériaux amiantés. Ensuite, il faut également que ces repérages soient complets par rapport à l’ensemble des pièces de vos bâtiments. Souvent, on voit dans les rapports des diagnostiqueurs qu’ils n’ont pas pu visiter tels ou tels locaux — et c’est souvent des locaux techniques où travaillent des équipes techniques — parce que pour X raisons, il n’y a pas les clés, etc. Et donc, c’est vraiment important d’avoir une connaissance de cette amiante, d’avoir les repérages complets.
Ensuite, une fois que vous avez fait ce repérage, il y a des actions à effectuer, notamment si le repérage indique qu’il y a bien des matériaux de la liste A ou bien des matériaux de la liste B. Alors ces actions, elles vont soit de modification de travaux ou de retrait, mais pas seulement. Ça peut être juste des mesures d’empoussièrement, une surveillance périodique à peu près tous les trois ans. Et toutes ces actions doivent être listées dans des documents de traçabilité. Des documents de traçabilité pour l’amiante, c’est ce qu’on appelle le DTA (diagnostic technique amiante). Et en fait, ce DTA doit comporter à minima les rapports de repérage, mais également, toutes les actions qui vont s’effectuer puisque si le rapport de repérage indique que vous avez des matériaux amiantés, mais que vous avez procédé à des travaux pour enlever ces matériaux, il faut avoir toute cette traçabilité.
Puis, le DTA doit également comporter des recommandations générales de sécurité — ça, c’est aussi pour votre personnel — et puis une fiche récapitulative puisque souvent, pour un même bâtiment, il y a eu X repérages, il y a eu X travaux, X mesures d’empoussièrement. Et donc, la fiche récapitulative qui est un modèle, d’ailleurs, au niveau de la réglementation vous permet, permet à vos équipes — c’est un outil au quotidien — de savoir de manière synthétique pour tel ou tel bâtiment, où on en est au niveau de l’amiante, quelle est sa localisation.
Donc ça, c’est vraiment très, très important pour vous, un outil au quotidien, mais également pour pouvoir communiquer en tant que propriétaire. En effet, toutes ces modalités de consultation du dossier technique d’amiante doivent être communiquées également aux représentants du personnel, également à la médecine du travail, bien sûr à toute personne aussi extérieure à votre établissement qui est amenée à faire des travaux, et puis la fiche récapitulative doit également être communiquée. Donc, j’insiste sur le fait que le DTA est un document vivant qui vous aide au quotidien et donc, toutes les actions que vous pouvez faire, ça doit être tracé et c’est un outil important.
Donc, il faut également avoir à l’esprit que tous ces repérages par rapport au Code de la santé publique, ce sont des repérages sur des matériaux amiantés accessibles. C’est-à-dire que si, par exemple, le rapport de repérage indique que vous n’avez pas d’amiante, ça veut uniquement dire que vous n’avez pas d’amiante accessible. Et donc, si vous décidez, par exemple, de faire des travaux destructifs au niveau d’une partie de vos bâtiments, vous avez potentiellement peut-être de l’amiante derrière. Ce n’est pas ce repérage qui vous l’indiquera, puisque c’est un repérage sur les matériaux accessibles qui a été fait sans travaux destructifs. Donc, dans le cas de gros travaux, peu importe, dans vos bâtiments, il est impératif d’effectuer un repérage avant travaux — là, on bascule dans le Code du travail, sur la partie où vous allez faire les travaux — et bien sûr, toujours d’alimenter vos documents de traçabilité, à la fois si ce sont vos employés, mais également, bien sûr, si c’est une entreprise extérieure qui fait les travaux.
Et de la même manière, c’est la même chose quand il y a une démolition de bâtiment. Il y a ce qu’on appelle la liste C, c’est-à-dire une liste beaucoup plus étendue de matériaux qui sont des matériaux non directement accessibles, et qu’il va y avoir un nouveau repérage qui va être fait pour qu’au moment de la démolition, il n’y ait aucune exposition à la fois pour vos salariés et pour les travailleurs qui interviennent, et puis toujours de mettre à jour la traçabilité et de communiquer.
Donc, voilà pour l’amiante. Je vous ai listé ici, ce sont des liens Légifrance, une petite synthèse sur la réglementation amiante Code de la santé publique. Je vais juste pointer juste ici, si je peux : l’arrêté du 21 décembre 2012 relatif aux recommandations générales de sécurité et au contenu de la fiche récapitulative parce que là, ça peut vous aider aussi à faire la synthèse en lien avec des diagnostiqueurs. Les informations sur le contenu de la fiche récapitulative sont listées ici.
Autres documents d’aide qui sont accessibles, tout ça, par des liens aussi : ça, c’est un guide très pratique sur l’amiante dans les bâtiments, annuaire des diagnostiqueurs et puis site ARS et site ministère.
Ensuite, on passe ici aux légionelles. Alors, les légionelles, je vous ai mis en petite photo les bactéries légionelles qui sont des petites bactéries sous forme de bâtonnets. Donc les légionelles, en fait, sont naturellement présentes dans les eaux, dans les milieux humides. Le danger dans vos établissements, c’est le fait qu’elles puissent coloniser les réseaux d’eau intérieurs de vos établissements, principalement le réseau d’eau chaude sanitaire, mais il est possible qu’elles viennent aussi dans les réseaux d’eau froide quand il y a certaines conditions.
L’exposition, c’est également une inhalation des microgouttelettes d’eau contaminées. Il n’y a pas de risque à boire de l’eau, mais par exemple pour vos travailleurs, c’est éventuellement la prise de douche ou éventuellement au lavabo s’il y a des phénomènes d’aérosolisation au niveau des lavabos.
Le risque sanitaire étant soit un syndrome grippal, donc bénin, soit bien justement la légionellose, ce qui est une infection pulmonaire grave et qui, potentiellement, peut entraîner des décès.
Alors, en tant que propriétaire et gestionnaire des bâtiments, vous êtes responsable des réseaux intérieurs de distribution d’eau ECS (eau chaude sanitaire), EF (eau froide). Et donc, on va voir comment permettre d’éviter l’exposition à ces légionelles.
Alors, est-ce que justement, votre établissement ou vos bâtiments sont concernés ? Au contraire de l’amiante, là, tous les bâtiments sont concernés, même les bâtiments neufs. Et on a vu, malheureusement, des bâtiments neufs qui, dès leur mise en exploitation, étaient contaminés par les légionelles, malheureusement souvent aussi du fait de mauvaise conception des installations, de mauvais équilibrage des réseaux. Donc voilà, ça, c’est vraiment très problématique. Alors, il existe un guide du CSTB (centre scientifique et technique du bâtiment) sur la conception des locaux neufs. Je vous en parlerai un petit peu après. Donc voilà, tous les bâtiments sont concernés.
Il y a une possibilité de prévention par une double surveillance : des analyses légionelles et des mesures de température – c’est une possibilité, mais c’est obligatoire – doivent être faites au niveau de vos établissements, notamment. Mais pour pouvoir mettre en place cette stratégie de surveillance, il est nécessaire d’avoir les plans des réseaux eau chaude sanitaire, eau froide. Et malheureusement, je pense que si je demandais aux services techniques s’ils ont les plans des réseaux électriques, il y aurait une réponse positive. Mais pour les plans des réseaux d’eau, on se rend compte que même des fois, pour des bâtiments neufs, les plans des réseaux d’eau ne sont pas toujours présents. Et en fait, c’est quand même fort problématique. Je parle vraiment des plans des réseaux d’eau parce que souvent, il y a le plan au niveau de la production de l’eau chaude sanitaire, mais au niveau ensuite de l’ensemble des réseaux de distribution, ce n’est pas clair.
Donc ça, c’est vraiment essentiel d’avoir ça pour pouvoir mettre en place une stratégie de surveillance cohérente, adaptée à votre établissement. Et bien sûr, les mesures de température doivent être effectuées à la fois en production et au niveau du réseau de distribution. Et surtout, il est essentiel de ne pas se baser uniquement sur les températures en production qui peuvent être tout à fait cohérentes. Mais ça ne présume pas de tout ce qui se passe au niveau de l’ensemble du réseau de distribution, qui est souvent très, très grand au niveau de vos établissements.
Et donc, le but étant, une des manières de prévenir la légionellose, c’est justement de maîtriser la température, sachant que la bactérie se développe très, très bien entre 25 et 45° C et bien sûr, la préconisation au niveau des réseaux d’eau chaude sanitaire, notamment, c’est d’avoir toujours une température pas en dessous de 50 °C. Alors bien sûr, de l’autre côté, il y aura attention à la prévention du risque de brûlure au niveau des chambres. Mais ça, ce n’est pas le propos d’aujourd’hui, mais bon. Et donc, il faut bien sûr réfléchir à des actions en cas de dérive de ces paramètres.
Deux autres points, outre la température, c’est justement la bonne circulation de l’eau au niveau des réseaux et la lutte contre l’entartrage et la corrosion.
Et donc, tous ces points généralement, ce sont soit les équipes techniques de vos établissements qui s’occupent de cela, soit ça peut être des prestataires externes également. Je me permettrai d’insister sur les contrats qui sont faits avec les prestataires externes. D’ailleurs, il y a également un guide du CSTB par rapport à ça, sur la conception et sur l’entretien des installations parce qu’il y a des points clés à vérifier au niveau des installations et des points clés pour tracer justement toutes les actions qui sont effectuées.
De la même manière que pour l’amiante, on a un document, un petit peu la bible des réseaux, c’est le carnet sanitaire qui peut être de manière électronique ou papier, peu importe, mais qui doit retracer tous les intervenants au niveau des réseaux, également l’identification de vos installations et puis tout ce qui est les modalités et les résultats de la surveillance, les modalités aussi de l’entretien et puis les résultats de l’entretien, toute la traçabilité de l’entretien et puis également les procédures. Donc, au niveau du carnet sanitaire.
Ensuite, j’insiste aussi sur le fait qu’il arrive quand même assez régulièrement que des réseaux d’eau soient contaminés par les légionelles sans qu’il y ait obligatoirement de cas de légionellose, ce qui est une maladie à déclaration obligatoire. Mais quand vos réseaux sont contaminés, il est vraiment essentiel — et c’est vrai que ça, c’est rarement fait — de rechercher vraiment la cause de la contamination pour éviter que cela ne se reproduise.
Normalement, les mesures de température sont des mesures de prévention qui peuvent vous aider justement à voir s’il y a eu une diminution de la température. Mais rechercher les causes, souvent, il faut faire appel à une entreprise extérieure spécialisée dans les réseaux, certifiée dans les réseaux, qui va pouvoir vous faire un audit sanitaire et faire des préconisations qu’il faudra aussi suivre. Et ça, c’est vraiment important.
Je vous liste également un petit peu une réglementation légionelle et notamment, j’insiste sur le dernier arrêté, arrêté du 30 décembre 2022 relatif à l’évaluation des risques liés aux installations intérieures de distribution d’eau destinée à la consommation humaine. D’ici la fin de l’année, tous les établissements d’Île-de-France vont recevoir une information vis-à-vis de cet arrêté. Théoriquement, les établissements du 92 ont déjà reçu un courriel par rapport à cet arrêté alors qu’à la fois, c’est une évaluation des risques sur l’ensemble des réseaux (réseaux d’eau chaude sanitaire et réseaux d’eau froide), à la fois pour le risque légionelle également, pour le risque plomb et du coup, qui demande de faire une analyse des risques par une entreprise également certifiée.
Vous avez ici – ça, c’est accessible, ce sont les documents gratuits, accessibles par un simple lien – le document du CSTB, document d’aide à la conception des installations, le deuxième document d’aide à la conduite et l’entretien des installations — je crois qu’ils ne font que 14 pages, c’est vraiment très didactique et très bien pour vos équipes techniques — les recommandations pour l’assurance de la température — ça, par contre, moi, je peux transférer par mail parce que pour l’instant, ce n’est pas sur un site — un guide gratuit du CSTB sur la maîtrise du risque de développement des légionelles, et puis d’autres guides d’informations.
J’ai listé ici — je passe très rapidement — les informations clés à indiquer au niveau du carnet sanitaire. Donc, je passerai rapidement.
Ici, la manière de rechercher des entreprises certifiées sur les réseaux d’eau sur le site du CSTB.
Et enfin ici, l’ensemble des contacts des huit départements Santé Environnement de l’Agence régionale de santé selon la localisation géographique de votre établissement.
Voilà, je vous remercie bien pour votre attention.
Stéphane Da Silva — Ingénieur conseil, pilote secteur sanitaire et médico-social (SMS) — Cramif
Merci beaucoup.